FTAP : combiner IA et vues aériennes pour actualiser les plans cadastraux et lutter contre la fraude fiscale

Retour d'expérience

Publié le 26 septembre 2023 par Service « Pilotage des transformations et des politiques prioritaires »

Avec le Fonds pour la transformation de l’action publique, la Direction générale des Finances publiques automatise l'exploitation des prises de vue aériennes publiques de l’IGN pour les comparer à la documentation cadastrale (plan et informations littérales). L’objectif : optimiser le processus de détection des constructions ou aménagements non déclarés, détecter les anomalies et ainsi lutter contre la fraude et répondre aux principes d’équité fiscale entre les citoyens, en assurant des ressources aux collectivités locales à leur juste niveau.

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visuel foncier innovant montrant à droite une photo aérienne et à gauche le traitement par l'intelligence artificielle

Combiner IA et prises de vue aériennes pour actualiser les plans cadastraux

Cofinancé par le Fonds pour la transformation de l’action publique (FTAP),  le projet « Foncier innovant » de la Direction générales des Finances publiques (DGFiP) permet à l’administration fiscale d’exploiter les images aériennes publiées par l’IGN en données ouvertes. Les résultats du traitement de ces données, et du repérage des contours de bâtis et piscines notamment, sont ensuite comparés par un algorithme avec les bases de données cadastrales (plans cadastraux et informations foncières littérales).

La documentation cadastrale peut ne pas être jour pour plusieurs raisons : manque de capacité à faire par les agents, déclarations non réalisées ou inexactes des propriétaires… Les anomalies potentielles identifiées sur la base de l’intelligence artificielle sont ensuite transmises aux agents de l’administration fiscale, et sont systématiquement examinées. Après examen et validation individuelle, une opération de relance du propriétaire du bien est déclenchée, l’invitant à procéder à une régularisation si l'anomalie est avérée.

Marina Fages, cheffe du bureau GF3A à la DGFiP et responsable du projet, nous présente le projet « Foncier innovant »

En quoi le projet « Foncier innovant » est-il innovant pour l’administration fiscale ?

« Foncier Innovant », c’est l’utilisation de l’IA pour analyser des images aériennes au service du cadastre. Auparavant, ces informations étaient ponctuellement et individuellement utilisées, mais jamais de façon industrielle et systématique comme le permet le recours à l’IA. Après la détection des piscines, nous travaillons à d’autres cas d’usages : le repérage automatique du bâti isolé ou des extensions de bâti non déclarés, ou encore la mise à jour automatique des données cadastrales. Par ailleurs, les contours repérés par l’IA ont vocation à enrichir la représentation du bâti (et des piscines) sur le plan cadastral, selon une « vue du ciel » qui constituera une nouvelle modalité de mise à jour du plan.

Quel a été l’apport du Fonds pour la transformation de l’action publique (FTAP) dans le déploiement du projet ?

Le FTAP a contribué à hauteur de 12 millions d’euros au financement du projet, soit 50 % de son coût total. L’accompagnement du Fonds a aussi aidé à faire mûrir le projet, en fixant des échéances à respecter pour l’avancée des réalisations. Il a permis de sécuriser les choix des équipes projets à chaque étape, de la montée en compétence technique.

Une expérimentation dans 9 départements soutenue par le Fonds pour la transformation de l’action publique (FTAP)

Afin de s’assurer de l’efficacité du dispositif, une expérimentation a été menée dans 9 départements (Alpes-Maritimes, Var, Bouches-du-Rhône, Ardèche, Rhône, Haute-Savoie, Morbihan, Maine-et-Loire, Vendée) afin de détecter les piscines non imposées.

À l'issue des opérations de relance menées auprès des propriétaires et de l'exploitation de leurs réponses, plus de 20 000 piscines ont été taxées au titre de la taxe foncière (TF) pour l'année 2022, ce qui représente près de 10 M€ de recettes supplémentaires pour les communes concernées.

Quels sont les bénéfices de ce projet pour les agents et les services publics ? Pour les contribuables ?

Ce projet constitue un axe de fiabilisation massif des bases foncières, qui peut être appliqué de façon industrielle et homogène sur l’ensemble du territoire, et de façon régulière et pérenne (les photos de l’IGN sont actualisées tous les ans par tiers des départements). Cela améliore la qualité des ressources fiscales des collectivités locales d’une part, et participe à une meilleure équité fiscale d’autre part. Le bénéfice financier, lui, va avant tout aux collectivités locales. L’expérimentation avait permis d’apporter 10 millions d’euros de recettes fiscales aux communes des 9 départements de test. Pour cette année, avec le passage d’échelle sur la détection des piscines, nous les avons estimées à 40 millions d’euros. La moitié de ces recettes sera pérenne. L’équité fiscale est au cœur de ce projet : la démarche engagée rend l’impôt plus clair et plus juste, tout le monde y gagne.

Un premier cas d’usage réussi : la détection des piscines non déclarées

20 000 piscines validées, dans 94% des cas les propriétaires ont confirmé le caractère imposable de leur piscine ;

10 M€ de recettes supplémentaires pour les collectivités concernées (+5,7 M€ pour le rattrapage des années non déclarées et +4,1M€ de recettes nouvelles récurrentes) ;

Plus de 120 000 propriétaires contactés en juin 2023 ; 40M€ de recettes fiscales supplémentaires sont attendues en 2023.

Quels ont été les défis à relever avec l’Intelligence artificielle pour la DGFiP ?

Notre direction a eu une grosse marche à franchir, car c’était tout à fait novateur de recourir à l’IA dans la sphère foncière et cadastrale. Novices en la matière, dans un premier temps, nous nous sommes appuyés sur la compétence des prestataires spécialistes, dans le but d’acquérir la maturité technique et méthodologique nécessaire à ce type de projet. Cependant, l’objectif à terme a toujours été l’internalisation de ces compétences, ce qui est aujourd’hui chose faite pour toute la partie IA. Nous avons désormais, à la DGFiP, nos propres équipes de spécialistes en intelligence artificielle. Ce sont eux qui travaillent aujourd’hui à l’amélioration des algorithmes existants et au développement de nouveaux cas d’usages. L’internalisation des procédures de croisement est elle aussi en cours, dans une logique de pleine maîtrise des compétences au sein de la DGFiP qui sera atteinte en 2024.

photo de marina Fages, cheffe du bureau GF3A à la DGFiP

Grâce à la dimension très innovatrice du projet soutenu par le FTAP, nous nous sommes appropriés des méthodes et une technicité qui nous ont fait franchir un cap. Nous sommes entrés dans une démarche d’expérimentation plus incrémentale. "

Marina Fages, cheffe du bureau GF3A à la DGFiP

En quoi ce projet a-t-il modifié vos méthodes de travail ?

Dans le cadre de l’accompagnement du changement, nous avons beaucoup expérimenté et appris des retours du terrain. Par exemple, en même temps que nous implémentions ce nouveau système, nous avons refondu l’applicatif métier ICAD que nos agents utilisent au quotidien, et qui héberge les tâches de validation des détections par les agents. Cela nous a conduits à une extension des fonctionnalités, à une simplicité d’utilisation aussi, aboutissant à un outil quasi ludique, ce qui a été très apprécié.

Ensuite, nous avons appris à travailler de façon plus agile. L’équipe projet a réuni, autour d’un Atelier Numérique du Foncier Innovant (ANFI), les équipes métier du bureau GF3A du cadastre, celles du Service de la Documentation Nationale du Cadastre (SDNC), ainsi que celles de la toute nouvelle Délégation à la transformation numérique (DTNum) qui a internalisé les compétences techniques que j’évoquais plus tôt, et les prestataires. Cet atelier est hébergé par le service de la documentation nationale du cadastre dans des locaux adaptés à l’organisation agile. Cette logique de co-construction a pleinement porté ses fruits et est désormais pérenne.

Enfin, la dimension très novatrice de ce projet nous a obligés à rentrer dans une démarche d’expérimentation plus incrémentale. Nous avons pris l’habitude de faire la démonstration de la validité de nos concepts avant de chercher à passer à plus grande échelle. On peut dire que nous nous sommes appropriés des méthodes et une technicité qui nous ont fait franchir un cap.

Le dispositif est généralisé sur l’ensemble de la France métropolitaine en 2023

Début juin 2023, des courriels (ou courriers pour les usagers non internautes) ont été adressés aux propriétaires de piscines identifiés à l’échelle de la France métropolitaine pour les inviter à régulariser leur situation. Ils ont pu ainsi déclarer en ligne leur piscine via le service « Biens immobiliers », au sein de leur espace sécurisé sur le site impots.gouv.fr.