1ère AMI "Intelligence Artificielle" : un an plus tard, où en sont les lauréats ?

Publié le 27 novembre 2019

Lancé par la DITP et la DINSIC (désormais DINUM) le 14 juin 2018 dans le cadre du programme d’investissements d’avenir (PIA), l'appel à manifestation d'intérêt dédié à l'Intelligence Artificielle a pour ambition d'accompagner les administrations qui souhaitent expérimenter des solutions d'IA.

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1ère AMI "Intelligence Artificielle" : un an plus tard, où en sont les lauréats ?

5 mois plus tard et après 52 dossiers analysés, 6 lauréats étaient sélectionnés pour bénéficier d'un appui de 10 mois visant à expérimenter à la fois des approches techniques d’intelligence artificielle et des modes de travail innovants.

À l'occasion de la Semaine de l'innovation publique 2019, les 6 lauréats ont dévoilé les premiers résultats de leurs projets lors d'une matinée dédiée à l'Intelligence Artificielle. Les solutions construites visent à apporter aux agents une aide dans leurs missions quotidiennes et ainsi à se libérer des tâches les plus répétitives pour concentrer leur expertise sur les missions prioritaires. Les premières conclusions devront être confirmées au moment du passage à l’échelle des prototypes, mais les résultats de cet AMI permettent de penser que l'intelligence artificielle offre de vraies opportunités à l'administration pour gagner en efficacité.

Pour cette première génération de projets, les administrations expérimentatrices doivent désormais décider si elles poursuivent ou non la démarche pour la généraliser à l'ensemble de leurs services. À noter qu'un deuxième appel à manifestation d'intérêt est en cours avec 15 autres lauréats sélectionnés qui entreront bientôt en phase de prototypage.

Développer un voice bot pour les utilisateurs du chèque emploi association

Agence centrale des organismes de sécurité sociale - Centre national Chèque emploi associatif

Le pitch

Développer ODEIS, le conseiller virtuel du chèque emploi associatif (47 000 associations adhérentes), un Voice Bot capable de répondre aux questions simples et récurrentes des associations ou d’identifier l’interlocuteur le plus pertinent vers qui renvoyer le cotisant à partir d’une question. 68% des contacts passent actuellement par la plateforme téléphonique, principal canal de sollicitation. Si le taux de décrochage téléphonique est de 85% en moyenne sur l'année, les pics d'activité, comme par exemple le lancement du prélèvement à la source, peuvent le faire baisser de façon significative. Par ailleurs, les questions de 1er niveau occupent 10% du temps d'activité des 33 conseillers du centre d'appel.

Les objectifs

  • Renforcer la continuité de service, notamment pour l’Outre-mer, grâce au traitement automatique des questions de niveau 1, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.
  • Améliorer la qualité du service rendu aux usagers en assurant une meilleure prise en charge des appels lors des pics d’activité et en aiguillant les questions complexes vers des conseillers référents, spécialistes du thème traité.
  • Améliorer l’environnement de travail des agents en valorisant leur expertise : focaliser leur activité sur les questions dites complexes pour développer une expertise plus pointue et un accompagnement plus qualitatif.

1 an après, où en sont-ils ?

Un modèle de transcription vocale a été développé sur la base de 7 500 heures d'échanges téléphoniques et de 10 000 emails. Une base de connaissance des questions de niveau 1 a également été élaborée ainsi qu'une arborescence de dialogue. 72 intentions et plus de 350 questions ont ainsi été recensées.
Les résultats atteints par ODEIS sont d’ores et déjà satisfaisants, avec un taux de 80% de bonnes réponses. Ces résultats continueront d’être améliorés en phase d’utilisation grâce à la capacité d’apprentissage du voicebot.

L'arrivée d'ODEIS, qui devrait être livré à la fin du 1er trimestre 2020, génère une forte attente des conseillers qui ont été fortement impliqués tout au long des travaux.

Détecter par images des irrégularités d'occupation des sols

Direction départementale des Territoires et de la Mer (DDTM) de l'Hérault

Le pitch

Utiliser l’IA pour automatiser la détection des infractions aux règles de l'urbanisme et de l’environnement, en particulier la "cabanisation" (caravanes, mobiles-home, petit bâti etc.). Le déclenchement d'un contrôle repose encore essentiellement sur un repérage empirique, des tournées sur le terrain ou des signalements. L'ambition est de développer un algorithme qui détecte automatiquement à partir d'images les infractions permettant de prioriser les moyens des contrôleurs et de cibler les contrôles. Pour la DDTM, l'enjeu est aussi de se positionner davantage sur l'animation d'une politique de contrôle à l'échelon du département en associant l'ensemble des parties prenantes.

L'objectif

Améliorer l’efficacité des contrôles en augmentant le nombre de contrôles terrain pertinents et permettre ainsi de mettre un terme plus rapidement aux infractions et aux risques qu’elles font peser sur les populations et l’environnement.

1 an après, où en sont-ils ?

Une application AIGLE a été développée avec trois volets : tout d'abord, une interface d'annotation qui a permis d'enrichir une bibliothèque d'images de référence grâce, un modèle d'algorithme capable de détecter sur les images aériennes des zones à enjeux les objets recherchés (caravanes, piscines, constructions en dur…) et une interface de restitution pour que les contrôleurs puissent visualiser et exploiter les résultats.

Les tests réalisés montrent une bonne capacité de détection des objets par l’algorithme. Cela devrait ainsi permettre de réduire le temps passé au repérage, de détecter des infractions dans des zones difficiles d’accès et d’intervenir plus rapidement en cas d’infraction, avant le délai de prescription. En contrepartie de cet accroissement de l’efficacité, une augmentation de la charge de travail liée aux suites judiciaires est à prévoir.

Cibler les contrôles de restaurants à partir des commentaires d'utilisateurs

Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation - Direction générale de l'alimentation

Le pitch

Le projet IAlim vise à optimiser les moyens de l'Etat en matière de contrôle des restaurants en ciblant mieux les établissements à risques à l'aide des avis des consommateurs déposés sur les plateformes numériques. Le recours aux méthodes de traitement automatique du langage naturel doit permettre d’analyser automatiquement les avis des consommateurs afin d’identifier les établissements présentant des risques importants en matière de sécurité sanitaire.

L'objectif

Augmenter l’efficacité des contrôles et ainsi réduire les risques sanitaires pour les consommateurs.

1 an après, où en sont-ils ?

Après avoir rapproché les données collectées sur les sites des données de la base de contrôle officiel de la DGAL, deux algorithmes ont été développés. Le premier algorithme est fondé sur une approche dite "par fouille de texte", de qualification de mots-clés. Le second repose sur une approche supervisée qui a prenant en compte différentes données sur les établissements et notamment les résultats des contrôles passés. Une interface web permet de consulter les résultats sous forme de listes (ou de cartes) des établissements à inspecter en priorité.

Les premiers résultats indiquent une augmentation très nette de la performance du ciblage : dans la pratique actuelle de contrôle, 18% des inspections aboutissent à un résultat défavorable pour l'établissement (Notes C ou D) ; les tests réalisés sur la base des contrôles passés montrent que cette proportion pourrait doubler grâce à l'utilisation du modèle.

L'outil est déjà disponible pour les inspecteurs et va être intégré dans le système d'information de la Direction générale de l'alimentation dès le 1er janvier 2020.

Mieux maîtriser les risques et les activités nucléaires

Autorité de sûreté nucléaire (ASN)

Le pitch

L'ASN rassemble 350 inspecteurs réalisant chaque année 1850 inspections pour contrôler 58 réacteurs nucléaires, 85 laboratoires et usines du cycle du combustible et plus de 50 000 installations du domaine de la médecine, de l'industrie ou de la recherche. Les constats et demandes dressés à la suite des inspections sur le terrain sont rendus publics dans des "lettres de suite" qui sont techniquement très denses et peuvent contenir une masse très importante d'information. Le projet SIANCE doit permettre d'exploiter grâce à l'IA les informations les plus pertinentes de ces lettres de suite afin de mieux identifier les éléments à contrôler lors des visites.

L'objectif

Détecter, grâce à l’analyse automatique des lettres de suite des inspections, les signaux faibles et les tendances statistiques issus des contrôles passés. Ces analyses doivent permettre d’accompagner les inspecteurs dans leur travail pour l’élaboration du programme d’inspection, la rédaction des lettres de suite ou encore l’évaluation des résultats du contrôle.

1 an après, où en sont-ils ?

Une interface d’annotation a été développée afin de permettre la constitution d’un échantillon d'apprentissage constitué de lettres de suites annotées par les agents. Sur la base de cet échantillon, un algorithme de traitement du langage naturel a été élaboré, afin d’identifier et d’extraire automatiquement les informations importantes au sein des lettres de suite. Les agents accéderont à une interface intégrant un moteur de recherche ainsi qu’un indicateur de tendances offrant une vision globale des thèmes présents dans l'ensemble des lettres de suite (thème non inspecté depuis longtemps, équipements en anomalie récurrente...).

Les premiers résultats sont déjà encourageants, l’algorithme permettant de détecter avec un bon niveau de pertinence les thèmes présents dans les lettres. Le modèle va continuer à être alimenté en données afin de permettre un apprentissage en continu.

Le projet a suscité une mobilisation très forte des agents de l’ASN, notamment pour l’annotation 4 000 lettres de suite.

Mieux orienter les contrôles de la police de l'environnement grâce à l'ia

Agence française pour la biodiversité

Le pitch

Les plans de contrôles de la Police de l’Environnement correspondent à l’organisation annuelle des services de l’Etat, à l’échelle départementale, de leur mission d’application de la Loi sur plus de 40 thématiques, allant des activités de chasse aux rejets industriels. Rien que pour l’Agence Française pour la Biodiversité, on parle de 20 000 contrôles par an en France.  Ici, ce sont les pollutions diffuses qui nous intéressent particulièrement : épandages, pesticides, mauvaises pratiques agricoles ou néo-rurales par exemple.

Deux départements ont localement participé au projet : l’Ille-et-Vilaine et le Morbihan. Ils ont été moteurs dans les choix techniques et stratégiques.

Notre intention est d’utiliser les technologies d’intelligence artificielle pour  mieux orienter les contrôles sur le terrain et de permettre aux inspecteurs de l’environnement de mieux cibler les territoires qu’ils investiguent. Ce temps leur permettra de se concentrer sur leur expertise : sensibilisation, prévention, accompagnement des autres services publics, meilleurs suivis et enquêtes.

Le projet porté par l’AFB vise à utiliser l’IA pour élaborer les plans de contrôle de la police de l’environnement qui sont appliqués à l'échelle des départements en matière de pollutions diffuses : épandages, pesticides, mauvaises pratiques agricoles ou néo-rurales par exemple. 20 000 contrôles sont réalisés par l’AFB chaque année, dont 11% seulement donnent lieu à un constat d’infraction. Avec les technologies de l'intelligence artificielle, l'ambition est de mieux cibler les territoires sur lesquels envoyer les inspecteurs afin qu'ils concentrent leur activité sur l'expertise, la sensibilisation et le suivi des suites après la sanction d'une infraction. Le projet a été développé sur les territoires de l'Ille-et-Vilaine et du Morbihan.

Les objectifs

  • Améliorer l’efficacité des contrôles en identifiant et priorisant le contrôle des zones à risque ;
  • Mieux accompagner les suites des contrôles non conformes ;
  • Exploiter de manière optimale les informations et les données disponibles en matière d’environnement.

1 an après, où en sont-ils ?

Le projet a été développé en trois étapes : tout d'abord, intégrer 93 sources de données descriptives de l’état environnemental et des pratiques humaines (état de l'environnement, pratiques agricoles) ; développer les algorithmes pour décrypter le lien entre ces variables et les risques d’infractions, en s’appuyant notamment sur les résultats des contrôles passés ; développer pour les métiers une interface web et des fonctionnalités de visualisation et d'explicitation des prédictions.

Au niveau statistique, la prédiction du risque d'infraction sortie du modèle est trois fois plus précise que celle issue de la superposition de cartes. En raison de la périodicité des contrôles, la validation empirique du modèle interviendra au premier trimestre 2020.

En matière de perspectives, le projet sera expérimenté dès 2020 dans l’ensemble e la région Bretagne et devrait être élargi à de nouvelles thématiques telles que la chasse ou le suivi des sécheresses.

Appuyer les médecins dans la préparation des réunions de concertations pluridisciplinaires

Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Toulouse

Le pitch

Le projet EBERS vise à utiliser l’IA pour aider au diagnostic et optimiser la préparation des réunions de concertation pluridisciplinaire (RCP) post-opératoire dans le traitement du cancer. L’intelligence artificielle doit permettre l’extraction des concepts médicaux précis issus des différents compte-rendus médicaux établis par les équipes soignantes impliquées dans la prise en charge du patient, composés à 70% de texte libre, et à en fournir un résumé standardisé.

Les objectifs

  • Améliorer la qualité de soins des usagers en diminuant le temps médical consacré à la recherche d’information médicale ;
  • Optimiser le déroulement des réunions de concertation pluridisciplinaires en permettant notamment d’aborder en priorité les cas les plus complexes

1 an après, où en sont-ils ?

Après la phase d’extraction des données et d’identification des concepts à extraire, le projet a consisté à développer un outil d’annotation ainsi qu’un moteur d’analyse sémantique reposant à la fois sur des règles expertes et sur du traitement automatique du langage naturel.

Les résultats des premières expérimentations montrent que l’outil EBERS fonctionne bien pour les cas simples et doit encore être amélioré pour les cas les plus complexes (multi-tumeurs par exemple) pour parvenir à extraire une plus grande proportion de concepts pertinents.

En perspective, l'outil, actuellement limité à la sénologie et aux compte-rendus d’anatomopathologie, pourrait être étendu à d'autres champs médicaux et d’autres types de documents. Si son efficacité se confirme, il pourra bénéficier à d’autres établissements de santé.

(1) Pour un aperçu des impacts et du potentiel de la transformation numérique sur les métiers des agents publics, vous pouvez consulter l’étude diligentée par la DITP : "Transformation numérique : dessinons les métiers de demain"

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